Chaque semaine, nos experts analysent l’évolution des prix du marché de l’énergie pour vous apporter un éclairage sur l’évolution du marché et vous accompagner dans le choix de la meilleure option pour vos contrats d’énergie. Retrouvez notre analyse pour la semaine du 28 Janvier 2022 ci-dessous :
Marché de l’électricité
Une instabilité tarifaire toujours prononcée
Cette semaine est synonyme de forte volatilité sur le marché électrique à terme français. En effet, en début de semaine, une tendance baissière semblait se dessiner le mardi 01 février avec un prix du Cal 2023 perdant 11,47 €/MWh sur la session précédente. Des températures plus douces et une production renouvelable accrue (notamment éolienne) avait fortement soutenu ce mouvement à la baisse. Néanmoins, dès la session suivante les prix repartent à la hausse dans le sillage direct des évolutions du prix du gaz naturel. En fin de semaine, les contrats calendaires 2023, 2024 et 2025 ne négocient respectivement à 153,07 €/MWh (-1,31 % sur la semaine), à 110,50 €/MWh (+5,69 %), et à 101,08 €/MWh (+4,83%).
Les conditions météorologiques soutiennent cette forte volatilité
A court terme, comme nous l’annoncions plus haut, des températures relativement douces ont limité la demande d’électricité sur toute la partie nord-ouest de l’Europe. Par ailleurs, un regain de l’offre de gaz russe en début de semaine permet également au prix de l’électricité de suivre celui du gaz. Cette nouvelle semaine, les prévisions d’une baisse de la production éolienne du fait de conditions météorologiques défavorables, ainsi que d’une disponibilité nucléaire faible (autour de 48 GW disponible fin janvier) pourraient soutenir les prix de l’électricité.
Les inquiétudes autour de la disponibilité nucléaire française se poursuivent
En parlant de disponibilité nucléaire, ce sujet reste toujours la source de préoccupation primaire des acteurs opérant sur le marché français. RTE, le gestionnaire de réseau, maintient d’ailleurs la vigilance sur l’approvisionnement électrique jusqu’à la fin de l’hiver en raison d’arrêts potentiels non planifiés d’un ou plusieurs réacteurs. La France étant très électro-intensive, donc électro-dépendante, une chute de température de l’ordre de 4°C sous les normales de saison pourrait contraindre le gestionnaire à interrompre l’approvisionnement de certains gros industriels, si les températures chutent plusieurs jours consécutifs.
D’ici à la fin du mois de février, RTE estime que la disponibilité nucléaire française devrait passer de 50 GW début février à 40-46 GW d’ici la fin du mois. Quoiqu’il en soit, la production nucléaire a déjà diminué sur le mois de janvier (par rapport à janvier 2021) de près de 5,7 % (2,1 TWh). C’est un record à cette période de l’année. Grâce à des températures clémentes, notamment dans le sud de la France, l’impact d’une telle baisse de production a pu être relativement limité. De manière générale, la situation reste donc très tendue sur un marché en constante évolution.
Le mardi 8 février, EDF annonce revoir à la baisse ses prévisions de production pour 2022 à 295-315 TWh contre 300-330 TWh estimés précédemment. C’est un niveau de production nucléaire historiquement bas.
L’état des infrastructures nucléaires continue de se dégrader
Dans le même temps, les arrêts des réacteurs de Penly 1 (1,3 GW) et de Chooz 1 (1,5 GW) sont prolongés de 5 mois supplémentaires, soit jusqu’au 31 octobre et au 31 décembre respectivement. La raison principale étant la prolongation de contrôles des circuits du système d’injection de sécurité. Jusqu’à présent, des fissures ont déjà été détectées sur plusieurs sites, probablement dues à la corrosion de ces systèmes d’injection de sécurité sur 4 réacteurs du parc.
Ce système de sécurité est essentiel à l’intégrité des réacteurs en cas d’accident en permettant de refroidir le cœur du réacteur et ainsi éviter la fusion du combustible. Tous ces éléments sont autant de signes négatifs pour le marché électrique français et les perspectives d’évolutions à la baisse sont minces.
Marché du gaz
Les flux gaziers restent tendus
Concernant le gaz naturel, la situation reste mitigée avec des prix toujours mis à l’épreuve par les approvisionnements gaziers russes et norvégiens. En début de semaine, de bonne conditions météo pour la production renouvelable, ainsi que des températures douces ont permis un recul significatif à la fois sur les prix de court terme (livraison mois+1, notamment) et sur la courbe lointaine, même si les variations restent plus modeste sur cette dernière. Bien que les inquiétudes sur un potentiel conflit armé entre la Russie et l’Ukraine persistent, les prix ont été soutenus à la baisse grâce à un arrivage croissant de GNL (notamment des Etats-Unis) et des volumes supplémentaires en provenance de Russie.
Il faut toutefois garder en tête que Gazprom n’a pas réservé de capacités de transport supplémentaires au point d’entrée de Velke Kapusany, ni de Mallnow, dans le cadre des enchères trimestrielles qui se sont tenues le lundi 07 janvier. Le vendredi 4 février, les contrats PEG Cal 2023, Cal 2024, et Cal 2025 se négociaient à 54,737 €/MWh (-2,72% par rapport à la semaine précédente), à 35,941 €/MWh (+2,63%), et à 28,417 €/MWh (+1,71%).
La situation géopolitique est toujours instable et perturbe l’approvisionnement
En fin de semaine dernière, on annonçait que des rencontres diplomatiques devraient avoir lieu très rapidement permettant au Président Poutine et au Président français de se rencontrer et d’échanger, dans l’espoir de trouver une issue pacifiste sur ce dossier très périlleux qui met en alerte le monde entier.
En effet, tant que la situation ne sera pas clarifiée, ce qui par ailleurs n’est pas gagné, les acteurs des marchés énergétiques européens resteront dans l’incertitude concernant les approvisionnements futurs. Il semble donc peu probable qu’une baisse significative et durable des prix puisse avoir lieu avant la résolution de ce conflit.
L’Europe s’adapte, les Etats-Unis se hissent en première place
Quoiqu’il en soit, les flux russes ont d’ores-et-déjà été fortement réduits sur le mois de janvier 2022, par rapport à l’année précédente. On estime en effet que ces flux ont atteint des niveaux historiquement bas, à 50 millions de m3 /jour (moins de la moitié du niveau constaté en 2021). Et la situation ne devrait pas être meilleur en février.
Néanmoins, l’arrivée de GNL permet déjà d’absorber une partie de ces baisses de flux gaziers russes. On estime que les importations de GNL ont représenté en janvier 490 millions de m3 /jour (soit 34 % de l’approvisionnement total de l’Europe). Les Etats-Unis sont d’ailleurs désormais le plus grand fournisseur unique du Vieux Continent.
Marché des émissions
La tendance reste à la hausse
Concernant le système européen d’échange de quotas, une bonne tendance haussière s’est dessinée cette semaine. En fin de semaine, le contrat de référence Dec.2022 atteint un nouveau record historique le vendredi 4 février, se négociant à 96,45 €/t (+7,23 €/t en une semaine, soit +8,10%).
Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette course aux 100 €/t, alors même que les prix du gaz naturel corrigeait à la baisse en début de semaine et que la production renouvelable était bonne. En effet, à partir de mercredi, le prix commence à bondir après l’annulation de la vente aux enchères quotidienne d’EEX pour des raisons techniques. Les participants se sont donc naturellement tournés vers le marché secondaire pour acheter des quotas.
Le marché des UEA se transforme
Le marché des émissions semble prendre un nouveau chemin, plus éloigné des fondamentaux que jusqu’alors. Il semblerait en effet que la présence et l’action d’acteurs spéculatifs aient poussé à faire grimper le prix des EUA, en ayant comme ligne d’horizon la barre symbolique des 100 €/t.
Néanmoins, les prises de profit, des températures douces, une meilleure production renouvelable ou encore des volumes d’enchères plus élevés pourraient permettre de limiter la hausse constatée cette semaine.
Dans tous les cas, le prix des EUA semble bien installé au-dessus des 90 €/t, et une forte correction ne semble pas à l’ordre du jour tant les prix du gaz naturel et du charbon pour la production d’électricité restent à des niveaux très élevés.
Marché du charbon et du pétrole
La pression maintient les prix à la hausse
Le prix de l’or noir brut (Brent mois+1 et WTI mois+1) est pour la 7ème semaine consécutive à la hausse. La réunion mensuelle de l’OPEP+ qui s’est tenue cette semaine ne semble avoir eu aucun impact sur le marché. En effet, la situation géopolitique très tendue dans plusieurs régions du monde fait toujours peser de fortes pressions haussières.
Il faudra encore ici attendre la détente du conflit russo-ukrainien pour voir le ciel s’éclaircir. Le vendredi 4 février, le prix du Brent mois+1 clôture à 93,27 $/bbl, soit en hausse de 3,24 $/bbl par rapport au vendredi précédent (+3,60%).
La Russie inquiète, l’Indonésie entre sur le marché
Comme d’habitude, on termine sur le charbon qui est resté relativement stable cette semaine dans un contexte de meilleur approvisionnement et de températures plus douces, en tout cas à court-terme. Sur la courbe lointaine, le prix des contrats à terme n’évolue que très peu. Les exportations indonésiennes sont autorisées depuis la semaine passée et devraient progressivement alimenter le marché mondial.
En Europe, la résolution du conflit russo-ukrainien est attendue avec impatience. Il faut en effet garder à l’esprit que la Russie est le 3ème producteur mondial de charbon. Le vendredi 4 janvier, le contrat API2 Cal 2023 clôture à 117,25 $/t.