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Analyse marché énergie: semaine 20 juin 2022

évolution marché énergie

Découvrez dans cet article l’analyse de nos experts concernant l’évolution du marché de l’énergie (gaz, électricité, pétrole, charbon…) pour la semaine du 20 juin 2022 (prix de clôture au vendredi 24 juin).

Marché de l’électricité

Une hausse exceptionnelle du prix de l’électricité pour l’année 2023

Cette semaine, la courbe de long terme sur les marchés de gros de l’électricité en France et en Europe poursuit sa tendance à la hausse. En effet, les prix du contrat CAL 23 ont augmenté de +13,73 €/MWh par rapport au vendredi 17 juin en clôturant à 321,53 €/MWh ce vendredi 24 juin (soit une hausse significative de +4,46 % en une semaine). Autrement dit, cela représente une augmentation de +11,64 % en deux semaines (par rapport au lundi 13 juin où les prix du CAL 23 avaient clôturés à 288 €/MWh). Un nouveau sommet historique a également été atteint cette semaine sur le CAL 23 avec un prix de clôture à 324,91 €/MWh ce jeudi 23 juin.

Les prix de l’électricité subissent la diminution de l’offre de gaz naturel en Europe

Après une semaine portée par une hausse des prix en raison d’une forte demande liée à la période de canicule en France, la poursuite de cette tendance haussière s’explique principalement par un choc d’offre sur le marché. En effet, le marché subit actuellement la baisse drastique des livraisons de gaz russe via le gazoduc Nord Stream 1. Cette restriction des flux de gaz est d’autant plus impactante sur les prix de l’électricité que la plupart des pays européens dépendent des centrales à gaz pour répondre à la demande d’électricité. Pour rappel, la production d’1 MWh d’électricité nécessite la consommation de 2 MWh de gaz naturel. Face a cette situation de crise énergétique en Europe, plusieurs pays ont d’ores-et-déjà annoncé se tourner vers leurs centrales à charbon pour compenser le gaz russe, c’est notamment le cas pour l’Allemagne, l’Autriche et les Pays-Bas.

La situation critique sur l’offre de gaz en Europe a de fortes répercussions sur les prix du gaz et de l’électricité. La réponse de la Russie à l’embargo européen ne s’est pas fait attendre, et la question de son intérêt se pose alors que le conflit avec l’Ukraine ne semble pas s’arrêter. L’Europe aurait-elle fait le mauvais choix en voulant pénaliser la Russie ? Toujours est-il que la tendance haussière devrait se maintenir à court et moyen terme, synonyme que de nouveaux sommets pourraient être atteints, pouvant alors rendre ceux d’aujourd’hui obsolètes.

Tristan BAUDU, Analyste Pricing

Consommer moins pour soulager le réseau

Avec le manque de disponibilité des centrales nucléaires, notamment en France où 12 réacteurs nucléaires ont été arrêtés depuis le début de l’année, le recours aux centrales à gaz est la solution alternative pour produire de l’électricité. Le parc français composé de 56 réacteurs nucléaires qui produit normalement environ 400 TWh ne produira qu’environ 300 TWh cette année.

Les prix de l’électricité restent alors toujours impactés par ceux du gaz naturel. Comme nous l’indiquions, il faut également s’attendre à de nouveaux épisodes de canicule cet été dans un contexte où les disponibilités nucléaire et hydraulique sont amoindries, les gestionnaires de réseau devront être vigilants à ces pics de consommation et ses contraintes de production pour maintenir la stabilité du réseau.

Toute économie d’énergie est bonne à prendre, alors que nous sommes en période estivale, les actions d’efficacité énergétique et de sobriété énergétique sont mises au premier plan afin d’apaiser la tension sur le marché. Pour rappel, la France devrait être importatrice nette d’électricité cet été en raison des prévisions d’indisponibilités nucléaires élevées. Le marché de l’électricité est donc plus tendu que jamais à court et long terme, et face à cette flambée des prix, les 3 plus gros énergéticiens français ont pour la première fois appelés à la décroissance au travers d’une réduction immédiate des consommations d’électricité, de gaz et de pétrole par les consommateurs finaux.

Les prix de long terme sont à la baisse

Sur la courbe de long terme, en opposition par rapport au CAL 23 en forte hausse, les contrats en baseload pour une livraison en 2024 (CAL 24), 2025 (CAL 25) et 2026 (CAL 26) en France se négocient respectivement quant à eux à 197,83 €/MWh (-4,05 €/MWh), à 168,75 €/MWh (-9,48 €/MWh) et à 147,59 €/MWh (-8,26 €/MWh) le vendredi 24 juin. L’accalmie de la semaine précédente s’est donc accentuée à la baisse à long terme cette semaine, de même pour le contrat CAL 26 qui est repassé dans le rouge.

On peut s’attendre à des fortes volatilités dans les prochaines semaines. Nous sommes actuellement en pleine reconstruction du paysage énergétique mondial au regard de cette flambée des prix et du retour au charbon pour plusieurs pays. Nous pouvons même nous attendre à un retour au charbon en France pour pallier le manque de gaz : le gouvernement envisage le redémarrage de la centrale de Saint-Avold (595 MW). L’incitation des énergéticiens à réduire notre consommation est le signe d’une reconception du paysage énergétique portée par des craintes d’approvisionnements et de réels risques de pénuries.

Tristan BAUDU, Analyste Pricing
évolution prix électricité 2022

Marché du gaz

Nouveau sommet historique du prix du gaz

La courbe de long terme sur le marché du gaz naturel a, comme pour l’électricité, poursuivi sa forte tendance haussière cette semaine avec des prix qui sont passés au-dessus des 90 €/MWh. Les contrats pour une livraison en 2023 (PEG CAL 23) se négociaient à 91,240 €/MWh le vendredi 24 juin, soit une hausse de +10,925 €/MWh (+13,60 %) en une semaine. Outre le dépassement des 90 €/MWh, cette semaine est également synonyme de nouveau sommet historique pour le marché du gaz avec un prix de clôture du CAL 23 (PEG) à 93,452 €/MWh ce jeudi 23 juin. Le contrat Month Ahead (M+1) du PEG se négociait quant à lui à 116 €/MWh ce vendredi 24 juin (soit une hausse de 10,21 % en une semaine).

L’offre de gaz diminue fortement

La baisse des flux de GNL en provenance des Etats-Unis provoquée par l’arrêt du terminal américain Freeport LNG pour des raisons de maintenances à la suite d’une explosion, impacte toujours les prix du gaz. Les inquiétudes persistantes sur l’approvisionnement en gaz en Europe sont sources de tensions accrues et d’une forte volatilité sur le marché du gaz. Alors que certains pays européens n’avaient déjà plus accès au gaz russe (la Bulgarie, la Pologne, la Finlande, les Pays-Bas et le Danemark), la liste des pays souffrant de l’approvisionnement s’agrandit avec l’Allemagne, la France et l’Italie. En effet, l’annonce de la Russie concernant la réduction drastique des livraisons via le gazoduc Nord Stream 1 apparaît comme un choc d’offre sur le marché alors même que les pays européens tentent de faire des réserves pour la période hivernale. Face à cette situation, l’Allemagne envisage de réaffecter le gazoduc Nord Stream 2, pourtant laissé à l’abandon récemment.

Les objectifs de remplissage des stocks se poursuivent

Du côté du stockage, l’objectif européen qui prévaut est le remplissage à 80 % des réserves de gaz pour passer l’hiver face aux contraintes de livraisons russes, les pays européens ont en moyenne atteint un niveau de réserve de 56 % à date. En France, malgré le contexte compliqué en termes d’approvisionnements, le taux de remplissage des réserves a atteint près de 60 % alors qu’ils étaient remplis à près de 46 % à la même date en 2021. En causes notamment, un démarrage de l’injection de gaz plus précoce que les années précédentes ainsi qu’un rythme de remplissage élevé. Elisabeth Borne s’est exprimée ce jeudi 23 juin au sujet de la situation énergétique : elle a annoncé que la France pourrait se passer totalement des flux de gaz russe grâce à des réserves de gaz remplies à 100% ainsi qu’à l’arrivée d’un nouveau terminal méthanier flottant dès 2023 au Havre.

De nouveaux projets sont en cours pour développer l’offre sur le long terme

Les pays européens recherchent activement de nouvelles sources d’approvisionnements en gaz. Afin de pouvoir bénéficier de volumes rapidement, le meilleur moyen est l’utilisation du GNL (plus flexible). L’arrivée d’un nouveau terminal méthanier en France serait alors un point d’entrée additionnel qui pourrait permettre de ne plus dépendre du gaz russe. Une nouvelle source d’approvisionnement devrait rapidement être mise en œuvre avec l’accord énergétique trilatéral entre l’UE, Israël et l’Egypte pour importer du GNL. À plus long terme, le gaz issu du projet NFE (North Field East) au Qatar regroupant à date TotalEnergies, Eni et ConocoPhillips devrait être exploité à partir de 2026.

Les prix du gaz sont très volatils

Ainsi, sur la courbe de long terme, les contrats PEG pour 2024 (CAL 24) et pour 2025 (CAL 25) se négociaient respectivement à 60,45 €/MWh (+0,13 %) et à 42,725 €/MWh (-9,19 %) le vendredi 24 juin. La situation reste tendue à court et moyen terme avec la refonte des stocks européens et le manque de disponibilité des centrales nucléaires. La baisse des flux de GNL américain et l’assèchement du gazoduc Nord Stream 1 alimente davantage la tension du marché. L’annonce relative au gazoduc s’était traduite par un nouveau record du cours du gaz avec un prix à plus de 85 €/MWh le mercredi 15 juin, cependant ce record n’est plus depuis cette semaine avec le dépassement des 90 €/MWh.

De la même façon que pour le marché de l’électricité, le choc d’offre de gaz naturel à la suite de la décision de Moscou impacte fortement à la hausse le prix du gaz. A plus long terme cependant, la tension s’atténue (le CAL 25 enregistre une baisse de -9,19 %) puisque des sources d’approvisionnements alternatives seront effectives. A court terme, les inquiétudes grandissantes maintiennent une forte tension et une forte volatilité des prix. La tendance haussière devrait se poursuivre avec la constitution des réserves de gaz européen. Face aux risques d’approvisionnements et à l’insécurité énergétique grandissante, les craintes de pénuries communiquées par l’AIE sont réelles. On peut s’attendre à un passage au-dessus des 100 €/MWh à court terme.

Tristan BAUDU, Analyste Pricing
évolution prix gaz 2022

Marché des émissions

Le marché des émissions a connu une légère hausse cette semaine. Ce vendredi 17 juin le contrat de référence DEC.22 se négociait à 83,43 €/t, soit une variation de 1,06 €/t en une semaine (+1,29 %). Le Parlement européen a adopté la réforme du marché du carbone dans le cadre de l’engagement de l’UE de la neutralité carbone à horizon 2050. Ainsi, le nouveau marché ETS sera élargi à l’aviation, au secteur maritime, au tertiaire et au fret routier. De plus, il est prévu l’arrêt progressif des allocations de quotas d’émissions gratuits à partir de 2027. Enfin, une taxe carbone sera mise en place sur les importations aux frontières de l’UE.

L’utilisation massive des centrales à charbon en Europe afin de pallier le choc d’offre de gaz russe devrait impacter le marché du carbone à la hausse. Le prix de la tonne de CO2 est toujours dans son corridor de prix entre 80 €/t et 90 €/t. Cependant il est probable qu’il dépasse les 90 €/t, voire les 100 €/t à moyen terme.

prix co2 2022

Marché du charbon

Du côté du charbon, les prix de long terme (Rotterdam API 2 CAL 23) suivent une tendance haussière et sont passés au-dessus des 250 $/t. Ainsi, le vendredi 24 juin, le contrat API 2 Rotterdam (CAL 2023) clôturait à 252,58 $/t, soit une hausse de +8,31 % par rapport au vendredi 17 juin. Outre la reprise économique de la Chine, la consommation devrait être poussée à la hausse en raison du recours aux centrales à charbon en Europe à la suite de la fermeture du robinet du gazoduc Nord Stream 1. Bien qu’étant le moyen de production d’électricité le plus polluant du point de vue des émissions de CO2, le charbon semble avoir le vent en poupe avec une demande haussière, on peut donc s’attendre à une tendance haussière sur les prix du charbon à court et moyen terme.

prix charbon 2022

Marché du pétrole

En ce qui concerne l’or noir, les prix du Brent (mois+1) semblent se concentrer dans un corridor de prix entre 110 $/bbl et 120 $/bbl. Après avoir suivi une tendance baissière la semaine précédente permettant de redescendre sous les 120 $/bbl, le Brent (mois+1) a clôturé à 113,12 $/bbl ce vendredi 24 juin, soit exactement le même prix de clôture que celui du vendredi 17 juin. Il semble y avoir un support à 110 $/bbl puisque les prix sont remontés juste après avoir atteint 110,05 $/bbl le jeudi 23 juin. Le cours du brut se stabilise cette semaine malgré une volatilité significative.

Les prévisions d’évolutions du marché du pétrole sont tiraillées entre les craintes d’une récession qui pourrait impacter la demande à la baisse (en raison de l’inflation, de la hausse du prix des matières premières et de la hausse des taux directeurs) et les inquiétudes portant sur un manque d’offre face à une demande soutenue. Comme nous l’indiquions précédemment, la baisse des prix du pétrole provient notamment d’une crainte de récession à la suite de la hausse des taux directeurs de la FED pour apaiser l’inflation. Cependant, la reprise économique chinoise pourrait contenir la demande à un niveau relativement élevé. A court terme, les prix du brut devraient rester à un niveau élevé. Face à l’embargo européen sur le pétrole, la Russie se tourne vers son principal partenaire économique – la Chine – pour exporter ses volumes de brut (une hausse de 55 % des importations par rapport à 2021). Initialement instauré pour entraver la guerre avec l’Ukraine, cet embargo apparaît inefficace contre la Russie qui semble assurer ses revenus pétroliers via la commercialisation avec la Chine.

prix pétrole 2022

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