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Marché de l’énergie : analyse de la semaine du 27 juin 2022

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Nos experts décryptent pour vous toute l’actualité du marché de l’énergie de la semaine du 27 juin 2022. Découvrez leurs perspectives d’évolution dans cet article.

Marché de l’électricité

Des sommets historiques pour le prix de l’électricité

Cette semaine, la courbe de long terme sur les marchés de gros de l’électricité en France et en Europe poursuit sa tendance à la hausse de manière plus significative encore. En effet, les prix du contrat CAL 23 ont augmenté de +42,76 €/MWh par rapport au vendredi 24 juin en clôturant à 364,29 €/MWh ce vendredi 1er juillet (soit une hausse significative de +13,30 % en une semaine). Autrement dit, cela représente une augmentation de +18,46 % en un mois (par rapport au mercredi 1er juin où les prix du CAL 23 avaient clôturés à 307,53 €/MWh). Un nouveau sommet historique a également été atteint cette semaine sur le CAL 23 avec un prix de clôture à 365,67 €/MWh ce jeudi 30 juin.

Le nucléaire français à la baisse, le charbon de nouveau sollicité

Alors que le parc électrique français subit son manque de disponibilité nucléaire (12 réacteurs à l’arrêt), les facteurs haussiers sur le marché de l’électricité se succèdent : hausse de la demande et baisse de la production en raison de la canicule, puis baisse de l’offre de gaz à la suite de l’annonce du Kremlin concernant le gazoduc NordStream 1.

En effet, avec une capacité de production nucléaire historiquement basse, la France fait appel aux centrales à gaz pour produire de l’électricité et répondre à la demande, le marché de l’électricité subit alors fortement la hausse des prix du gaz. Initialement forte de sa capacité de production nucléaire (en matières de coût de production et de continuité de la production), la France se révèle fragilisée lorsqu’une partie de ses réacteurs sont à l’arrêt : l’atout nucléaire français s’avère également être son talon d’Achille. Plusieurs pays ont d’ores-et-déjà annoncé se tourner vers leurs centrales à charbon pour compenser le gaz russe, c’est notamment le cas pour l’Allemagne, l’Autriche et les Pays-Bas. La France envisage également de relancer sa centrale de Saint-Avold (d’une puissance de 595 MW).

Le réseau français doit pouvoir répondre à la demande

Face à cette situation et à la flambée des prix qui en résulte en Europe, la France semble être dans une impasse. Les 3 plus gros énergéticiens français ont fait une annonce inédite fin juin en appelant les consommateurs finaux à réduire immédiatement leurs consommations d’électricité, de gaz et de pétrole. Malgré les risques de pénuries cet hiver, 7 GW de capacités renouvelables (3 GW de solaire et 4 GW d’éolien) sont toujours en attente de raccordement alors que les conventions avec RTE sont déjà établies. Le raccordement de ces capacités renouvelables pourrait permettre de répondre à une partie de la demande d’électricité tout en se libérant à la dépendance aux centrales à gaz.

Du côté du réseau, RTE prévoit de doubler ses investissements sur les 15 prochaines années afin de répondre à la hausse de la consommation, de remplacer des infrastructures vieillissantes et assurer le développement des énergies renouvelables intermittentes (qui doivent être raccordées au réseau). On peut alors s’attendre à une hausse du coût du TURPE ces prochaines années.

Comme nous l’indiquions, il faut également s’attendre à de nouveaux épisodes de canicule cet été dans un contexte où les disponibilités nucléaires et hydrauliques sont amoindries, les gestionnaires de réseau devront être vigilants à ces pics de consommation et ses contraintes de production pour maintenir la stabilité du réseau. 

Les prix sur le long terme de retour à la hausse

Sur la courbe de long terme, la tendance s’est retournée par rapport à la semaine précédente, les contrats en baseload pour une livraison en 2024 (CAL 24), 2025 (CAL 25) et 2026 (CAL 26) en France se négocient respectivement quant à eux à 206,13 €/MWh (+8,30 €/MWh), à 172,50 €/MWh (+3,75 €/MWh) et à 154,90 €/MWh (+7,31 €/MWh) le vendredi 1er juillet. La tendance baissière de la semaine précédente sur les contrats de long terme s’est donc retournée à la hausse cette semaine traduisant une augmentation de la tension sur le marché également à long terme.

La situation critique sur l’offre de gaz en Europe a de fortes répercussions sur les prix du gaz et de l’électricité. Face à l’incertitude sur la situation énergétique dans les prochains mois, l’Europe souhaite présenter un plan coordonné entre les pays membres en juillet pour se préparer en cas de coupure totale des flux de gaz russe cet hiver. La tendance haussière devrait se maintenir à court et moyen terme, nous pouvons nous attendre à de fortes volatilités des prix ainsi qu’à de nouveaux sommets sur le marché de l’électricité. Il est fortement probable de voir les prix du CAL 23 dépasser la barre symbolique des 400 €/MWh d’ici la fin de l’été. Les efforts en matière d’efficacité énergétique et de sobriété énergétique sont attendus afin de réduire notre consommation face aux risques de pénuries.

Tristan BAUDU, Analyste Pricing

Marché du gaz

Nouveaux sommets historiques du prix du gaz naturel

La courbe de long terme sur le marché du gaz naturel a, comme pour l’électricité, poursuivi sa forte tendance haussière cette semaine avec des prix qui sont passés au-dessus des 100 €/MWh. Les contrats pour une livraison en 2023 (PEG CAL 23) se négociaient à 101,02 €/MWh le vendredi 1er juillet, soit une hausse de +9,78 €/MWh (+10,72 %) en une semaine. Cela représente un nouveau sommet historique pour le marché du gaz. En prenant davantage de recul sur la période, cela représente également une hausse de +39,67 % en un mois, depuis le 1er juin.

Des évènements internationaux perturbent l’offre

Les évènements actuels ne cessent d’accroître la pression sur le marché. La hausse des prix sur les plateformes européennes relève principalement du choc d’offre intervenu récemment à la suite de la forte diminution des flux via le gazoduc NordStream 1. Alors que Moscou prétend avoir baissé ses exportations de gaz pour des raisons techniques, l’Allemagne et l’Italie dénoncent l’aspect politico-stratégique de cette manœuvre russe. De plus, l’arrêt du terminal méthanier Freeport LNG aux Etats-Unis devrait durer environ 3 mois ayant pour conséquence une baisse d’environ 15 % des capacités d’exportation de GNL américain. Au-delà, des perturbations au niveau international impactent le marché du GNL, notamment en Australie et au Japon. En parallèle, le volume d’exportation du gaz en provenance de la Norvège a connu une légère augmentation, permettant d’augmenter marginalement le volume d’offre de gaz en Europe, bien que cela ne soit pas suffisant pour apaiser la flambée des prix.

L’Europe et la France préparent l’hiver

La baisse des flux de gaz russe alimente les incertitudes concernant l’approvisionnement énergétique futur. Alors que les pays membres de l’Europe se préparent au pire scénario (une coupure totale du gaz russe cet hiver), la demande reste soutenue en raison des forts besoins d’injections de stockage en Europe pour cet hiver. En effet, le Conseil de l’UE a validé l’objectif d’atteinte de 80 % de taux de remplissage des stocks pour cet hiver. A date, les différentes injections européennes ont permis d’atteindre un taux de remplissage moyen de 58,5 % (soit environ 10 points supplémentaires par rapport à 2021). La France est au-dessus de cette moyenne européenne avec un niveau de remplissage de 64 % de ses stocks de gaz. Malgré les niveaux historiquement hauts des prix du gaz, le rythme de remplissage est soutenu.

De nouvelles sources d’approvisionnement sont en projet

L’Europe est activement à la recherche de nouvelles sources d’approvisionnements à court terme afin de palier le manque de gaz russe. Pour rappel, le gouvernement a annoncé que la France pourrait se passer totalement des flux de gaz russe grâce à des réserves de gaz remplies à 100% ainsi qu’à l’arrivée d’un nouveau terminal méthanier flottant dès 2023 au Havre. Récemment, l’Algérie a indiqué durant la semaine avoir découvert un important gisement gazier qui devrait être exploité à compter de novembre 2022. Cette nouvelle source vient compléter celles déjà identifiées : l’accord énergétique trilatéral entre l’UE, Israël et l’Egypte pour importer du GNL ; à plus long terme, le gaz issu du projet NFE (North Field East) au Qatar.

La forte pression sur le marché fait monter le prix du gaz naturel

Ainsi, sur la courbe de long terme, les contrats PEG pour 2024 (CAL 24) et pour 2025 (CAL 25) se négociaient respectivement à 66,52 €/MWh (+10,04 %) et à 45,77 €/MWh (+7,13 %) le vendredi 1er juillet. Le marché subit toujours une forte pression à court et moyen terme avec la baisse des flux de gaz russe. Les capacités affaiblies d’exportations de GNL mondiales ne permettent pas de stabiliser le prix du gaz tendu à court et moyen terme notamment en raison de la demande européenne élevée (avec la refonte des stocks européens et le manque de disponibilité des centrales nucléaires). La tension sur le marché se traduit par une tendance haussière sans précédent, nous sommes face à de nouveaux sommets chaque semaine, le dernier en date est celui du vendredi 1er juillet avec un prix du MWh à plus de 100 €.

De la même façon que pour le marché de l’électricité, le choc d’offre de gaz naturel relatif au gazoduc NordStream 1 impacte fortement à la hausse le prix du gaz. Comme nous l’avions indiqué la semaine passée, les prix du gaz ont dépassé les 100 €/MWh. A court terme, le cours devrait poursuivre sa tendance haussière avec la campagne européenne de remplissage des stocks de gaz et avec l’arrêt total du gazoduc prévu entre le 11 et le 21 juillet pour maintenance. Le marché est synonyme d’inquiétudes grandissantes maintenant une forte tension et une forte volatilité des prix. On peut s’attendre à un passage au-dessus des 120 €/MWh à court terme. Sommes-nous sur un nouveau support des prix à 100 €/MWh ? Affaire à suivre…

Tristan BAUDU, Analyste Pricing

Marché des émissions

Le marché des émissions a suivi une tendance haussière cette semaine, ce vendredi 1er juillet le contrat de référence DEC.22 se négociait à 85,58 €/t, soit une variation de 2,15 €/t en une semaine (+2,58 %). Le prix de la tonne de CO2 est même passée au-dessus des 90 €/t avant de retourner dans son corridor de prix entre 78 €/t et 90 €/t probablement en raison d’une prise de bénéfices de certains acteurs financiers. Le recours aux centrales à charbon afin de palier le manque de gaz apparaît toujours comme une pression haussière du prix du CO2. Le CO2 est donc sur cette tendance, tout comme le charbon. Encore une fois, il est probable de voir les prix de la tonne de CO2 passer au-delà des 100 €/t à moyen terme.

Marché du pétrole

En ce qui concerne l’or noir, les prix du Brent (mois+1) semblent se concentrer dans un corridor de prix entre 110 $/bbl et 120 $/bbl. Après avoir suivi une baisse la semaine précédente permettant de toucher les 110 $/bbl, le Brent (mois+1) a poursuivi sa tendance baissière en clôturant à 111,63 $/bbl ce vendredi 1er juillet, soit une baisse de -1,32 % en une semaine.

Les prévisions d’évolutions du marché du brut sont toujours mitigées, le marché reste très volatil entre craintes de récession et restrictions de l’offre du fait de problèmes d’approvisionnements. L’OPEP+ a reconduit ce jeudi 30 juin son augmentation de sa production à hauteur de +50 % pour le mois d’août. Cependant, malgré les efforts consentis, le cartel semble être limité physiquement et peine à respecter son engagement.

Au-delà, des doutes sur la capacité de hausse de la production des pays de l’OPEP+, des interruptions de production de brut en Libye et en Equateur apparaissent comme un facteur haussier du prix du pétrole sur les marchés. Enfin, en complément de l’embargo européen et face au changement de destination du pétrole russe (vers la Chine), les membres du G7 souhaitent instaurer un « cartel de la demande » afin de plafonner le prix du pétrole russe – un mécanisme complexe. Nous pouvons nous attendre à ce que le cours du pétrole reste volatil à court terme en raison du manque de visibilité sur le marché et sur les incertitudes de production. Il est difficile d’imaginer redescendre sous la barre des 100 $/bbl à court terme, nous devrions probablement rester dans la fourchette de prix précitée. Côté consommateur en France, TotalEnergies a annoncé mettre en place une ristourne de 0,12 €/L sur le carburant à la pompe cet été, cette mesure vient en complément de la réduction de 0,18 €/L déjà en place par le gouvernement.

Marché du charbon

Du côté du charbon, les prix de long terme (Rotterdam API 2 CAL 23) suivent une tendance haussière et sont passés au-dessus des 260 $/t. Ainsi, le vendredi 1er juillet, le contrat API 2 Rotterdam (CAL 2023) clôturait à 261,55 $/t, soit une hausse de +3,55 % par rapport au vendredi 24 juin. Le recours aux centrales à charbon en Europe pour palier le manque d’offre de gaz pousse la demande à la hausse et devrait à court et moyen terme être source d’une augmentation des prix du charbon. L’utilisation du charbon reste cependant l’énergie la plus polluante pour produire de l’électricité, et cela devrait être un facteur haussier sur le marché du CO2.


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