Nos experts analysent l’évolution des prix du marché de l’énergie (gaz, électricité, pétrole, charbon et émissions) pour la semaine du 18 juillet 2022. Découvrez dans cet article leurs perspectives pour les semaines à venir.
Marché de l’électricité
Le prix de l’électricité toujours aussi stable
Concernant cette semaine, le prix de l’électricité continue de se stabiliser. Certains fournisseurs sont toujours en arrêt du fait de la volatilité des prix. Les prix du contrat CAL 23 ont quand même légèrement augmenté de + 2,23 €/MWh par rapport au vendredi 15 juillet en clôturant à 465,30 €/MWh ce vendredi 22 juillet (soit une hausse de 0,48 % en une semaine).
Le nucléaire, la seule issue ?
La part du nucléaire représente une bonne partie dans le mix énergétique, soit près de 70%. Dans le cadre de la transition énergétique, il avait été fixé pour objectif de réduire de 50% la part du nucléaire d’ici 2025. Le but étant de favoriser le développement des énergies renouvelables.
Or de ce que nous observons et au vu du contexte, ces objectifs semblent être repoussés. En France, le président Macron a annoncé en février un plan de relance du nucléaire. Celui-ci prévoit la construction de 6 nouveaux EPR, et l’étude de la mise en chantier de 8 autres d’ici 2050. En plus de cela, l’ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire) a délivré une dérogation à 4 réacteurs nucléaires en France (notamment la centrale du Bugey) afin qu’ils continuent à fonctionner à un niveau minimal de puissance, même pendant la canicule.
Le nucléaire étant une des énergies les plus rentables pour produire de l’électricité, d’autres pays développent des projets. Le Japon par exemple va ouvrir 4 nouvelles centrales nucléaires afin de sécuriser sa production énergétique. Le Royaume-Uni a également donné son accord au lancement d’une nouvelle centrale nucléaire, dans le but de faire face au fait que 15 de ses réacteurs soient en fin de vie.
Combiner nucléaire et énergies renouvelables
Malgré cette volonté de plusieurs pays du monde de vouloir continuer à développer le nucléaire, ce n’est pas pour autant que les projets basés sur les énergies renouvelables sont délaissés. Les énergies vertes déjà sollicitées actuellement comme l’éolien, le photovoltaïque, ou l’hydraulique sont plutôt efficaces. Cependant, l’inconvénient réside dans le fait que ce sont des énergies intermittentes, qui ne fonctionnent que lorsque le climat le permet.
Pour résoudre ce problème d’intermittence, certaines technologies pourraient voir le jour dans les années à venir et donc permettre de stocker l’électricité produite par des infrastructures vertes.
Le stockage chimique à base d’hydrogène par exemple, représente une solution intéressante pour le stockage de l’électricité à grande échelle.
Ces technologies pourraient donc permettre aux énergies renouvelables d’occuper une plus grande part du mix énergétique, et donc à terme d’apaiser les tensions sur le marché de l’électricité.
Les prix à long terme, plus touchés que ceux à court terme
Sur la courbe de long terme, les prix se stabilisent, à l’exception du CAL 26 qui subit une augmentation. Les contrats en baseload pour une livraison en 2024 (CAL 24), 2025 (CAL 25) et 2026 (CAL 26) en France ont pu se négocier respectivement à 247,7 €/MWh (- 2,3 €/MWh), à 206,17 €/MWh (+ 3,57 €/MWh) et à 186,75 €/MWh (+18,3 €/MWh) le vendredi 22 juillet.
Comme nous pouvons le voir sur le graphique, les prix marquent un temps d’arrêt, ce qui est plutôt bon signe. Cependant, les nouvelles ne sont pas forcément rassurantes. Du fait de la nouvelle annoncée par Gazprom de réduire considérablement son flux de gaz vers l’UE, les prix de l’électricité en CAL 23 devraient donc suivre la tendance haussière des prix du gaz, et passer sans aucun doute la barre des 500€/MWh pour les semaines à venir.
Yanice MEGUENNI, Analyste Pricing
Marché du gaz
Le marché du gaz repart à la hausse
Cette semaine, les prix du gaz sont repartis à la hausse après avoir subi une baisse considérable. Les prix du contrat CAL 23 ont augmenté de + 8,75 €/MWh par rapport au vendredi 15 juillet en clôturant à 124,07 €/MWh ce vendredi 22 juillet (soit une hausse significative de 7,59 % en une semaine). En 1 mois, nous constatons une augmentation de 35,98 % (par rapport au vendredi 24 juin où les prix du CAL 23 avaient clôturé à 91,24 €/MWh). Si les prix étaient stables en début de semaine, l’incertitude planant sur les marchés a pu faire repartir les prix à la hausse.
Le marché du gaz, un échiquier à taille humaine ?
La Russie a pu de nouveau fournir du gaz ce jeudi 21 juillet en réouvrant le gazoduc Nord Stream 1. Les débits ont pu reprendre à un flux identique à celui d’avant fermeture, soit 40% de ses capacités. L’UE avait pour objectif de réduire à 90% ses importations de pétrole russe d’ici la fin de l’année, mais concernant le gaz, c’est une tout autre histoire. Il est en effet plus difficile de stopper radicalement l’importation de gaz, étant donné que la mise en place d’infrastructures de transport se fait davantage sur le long terme.
Dans le même temps, l’Europe a pour objectif de remplir au maximum ses réserves de gaz avant l’hiver et tente donc de multiplier ses importations. Toutefois, le climat géopolitique est particulièrement tendu et peut avoir un impact sur le marché. La Russie par exemple, suspecte le Canada d’avoir pu ralentir l’envoi de la turbine réparée dans le but de vendre ses propres hydrocarbures à l’Europe. Cela peut expliquer pourquoi le CAL 23 continue d’augmenter en fin de semaine, malgré la réouverture du gazoduc.
D’autres pays s’immiscent sur le marché européen
Ces conflits géopolitiques profitent à d’autres pays producteurs de gaz, qui peuvent donc s’immiscer sur le marché dans un contexte de concurrence moins accrue. Cette crise énergétique a donc pu motiver certaines nations à faire en sorte que leurs processus de recherche et d’investissement s’accélèrent. Les stratégies diffèrent ensuite en fonction des ressources de chacun. Pour la plupart des pays de l’UE, l’objectif est de diversifier l’approvisionnement afin d’être le moins dépendant possible de la Russie.
Pour les Etats-Unis, les intérêts ne sont pas les mêmes. Ce pays profite donc de cette situation dans le but de vendre du GNL (Gaz Naturel Liquéfié) dans des proportions plus élevées. L’objectif étant de devenir le premier producteur mondial de gaz. Cette production devrait atteindre des millions de mètres cubes par jour d’ici fin 2022. Cette prise de décision pourrait permettre d’accroître la liquidité sur le marché du gaz, et donc de permettre aux prix du gaz de retrouver « des cours normaux » à moyen et long terme.
Des prix haussiers sur le court terme, mais plutôt stables sur le long terme
Contrairement à l’électricité, les prix du gaz ont augmenté cette semaine, mais dans des proportions différentes. Les contrats PEG pour 2024 (CAL 24) et pour 2025 (CAL 25) se négociaient respectivement à 78,707 €/MWh (+1,26%) et à 51,25€/MWh (-1,06 %) le vendredi 22 juillet. Cela peu s’expliquer car sur le court terme, le marché est toujours aussi tendu. Le gazoduc Nord Stream 1 reprend, mais les flux sont toujours aussi peu élevés. En revanche, la stabilité peut s’expliquer par le fait que de plus en plus d’acteurs proposent de fournir du gaz dans les années à venir, et cela a donc un impact sur les prix.
Comme vous pouvez l’observer sur le graphique, cette baisse la semaine dernière a été aussi brutale que brève. À court terme, la tendance reste haussière dans les semaines et mois à venir. Le PEG 2023 serait d’ailleurs susceptible de frôler la barre des 200€/MWh dans les mois à venir, suite à la nouvelle annonce de Gazprom. En effet, le géant gazier annonce réduire ses flux de Nord Stream 1 de 50% dès mercredi, soit passer de 40% à 20%. Le président russe a pris cette décision suite à la turbine qui n’a pas encore été livrée par le Canada.
Sur le plus long terme, nous restons optimistes. De plus en plus de projets voient le jour concernant la production de gaz, ce qui pourrait donc permettre d’apporter plus de liquidités sur ce marché et faire en sorte que les prix retrouvent leurs cours normaux.
Yanice MEGUENNI, Analyste Pricing
Marché du pétrole
En ce qui concerne l’or noir, après avoir subi des baisses successives durant plusieurs semaines, le prix du Brent (mois+1) réaugmente légèrement cette semaine, mais reste tout de même stable. En ce vendredi 22 juillet, nous avons atteint un prix de clôture de 103,2 $/bbl, soit une hausse de 2,04 $/bbl (+2,02%) par rapport au vendredi dernier. Les prix ont augmenté dans un premier temps pour atteindre les 107,35$/bl mercredi dernier. Cette hausse a pu être influencée par la hausse des prix du gaz.
Ils ont pu ensuite redescendre en fin de semaine suite à l’annonce de l’API (l’American Petroleum Institute) sur ses stocks de pétrole, qui devraient augmenter de 1,86 million de barils. Cela a donc pu rassurer la demande, et faire en sorte que les acteurs ne soient pas pressés de remplir leurs stocks de pétrole.
L’augmentation des taux d’intérêt aux USA a également pu avoir un impact sur la baisse du prix du pétrole. Cela induirait une croissance limitée, et donc réduirait l’augmentation de demande de carburant.
De plus, les nouvelles concernant le pétrole sont plutôt bonnes étant donné que des ressources émergent aux quatre coins du monde. Des gisements de pétrole sont découverts dans le sud de l’Algérie. L’Irak prévoit par ailleurs d’exporter plus de pétrole.
Nous resterons donc sans doute sur une tendance baissière dans les semaines à venir.
Marché du charbon
Du côté du charbon, les prix étaient assez volatils cette semaine. Les prix de long terme (Rotterdam API 2 CAL 23) ont subi une baisse considérable et ont pu atteindre les 257,96 $/t en ce vendredi 22 juillet, soit une baisse de 10,59$/t (-4,11%) par rapport au vendredi dernier. Comme nous l’avons dit, le prix a pu connaître plusieurs variations. Il a augmenté dans un premier temps car les centrales à charbon continuent d’être sollicitées pour compenser avec le nucléaire. Avec la baisse des flux depuis la Russie, plusieurs pays européens relancent leurs centrales à charbon comme l’Allemagne et l’Italie. En Chine, la canicule fait que le charbon est encore davantage utilisé. Le prix a donc pu être à la baisse cette semaine, mais la tendance est à la hausse pour les semaines à venir.
Marché des émissions
Enfin, concernant le CO2, celui-ci a pu subir une baisse considérable. Cela faisait plus de 3 mois qu’il n’était pas passé en dessous de la barre des 80€/tCO2. Ce vendredi 22 juillet, le contrat de référence DEC.22 se négociait à 76,30 €/tCO2, soit une diminution de 9,08 €/tCO2 en une semaine (-10,63 %).
Cette baisse a pu être expliquée notamment par l’annonce par la Commission européenne des détails de son plan de réduction de la demande de gaz avant la période hivernale. Les industries vont fonctionner au ralenti, les échanges de quotas d’émission se feront donc dans des proportions moindres, ce qui explique que le prix du CO2 ait autant chuté.
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