Nos experts sont de retour pour vous présenter une analyse complète des dernières actualités sur les prix du marché de l’énergie à la date du 4 août 2023.
Marché du gaz
La fin des travaux de maintenance sur le site gazier norvégien rassure les marchés concernant la sécurité d’approvisionnement et a un impact favorable sur les prix du gaz. Cependant, on observe dans un même temps une diminution des livraisons du gaz naturel liquéfié (GNL) en Europe car les convois sont redirigés vers l’Asie. La Chine et l’Inde font face à des conditions météorologiques créant des pénuries énergétiques. Pour compenser cette baisse, l’Europe augmente ses importations de gaz en provenance de Russie de 6 % au mois de juillet. Les prix de la semaine sont finalement restés stables autour de 48€/MWh sur le CAL24 de cette semaine. Il clôture à 48,053 €/MWh le vendredi 4 août.
Les réserves de gaz en Europe ont désormais franchi le seuil des 85 %, tandis que la demande reste modérée, notamment dans le secteur industriel. En accord avec les révisions à la baisse de FocusEconomics, qui abaisse ses prévisions sur le prix du gaz de 22 %, les experts sont généralement sur une orientation neutre, voire baissière jusqu’à la fin de l’année. Cependant, il est important de noter que l’énergie gazière demeure soumise à une forte volatilité, largement influencée par la thermo sensibilité, la nature compétitive du marché du GNL et les enjeux géopolitiques actuels.
Marché de l’électricité
Les tarifs de l’électricité ont également enregistré une baisse au cours de la semaine précédente, chutant sous la barre des 160 €/MWh. La France poursuit sa séquence en tant qu’exportatrice d’électricité, maintenant ce statut pour le septième mois consécutif en juillet, tout en augmentant progressivement sa capacité de production.
Vous souhaitez profiter de cette baisse du prix de l’électricité ? Prenez rendez-vous avec un de nos experts !
L’offre d’électricité à la hausse en France
En France, les capacités de production continuent de s’améliorer, en particulier sur le parc nucléaire qui a connu une augmentation de sa production de 24 TWh, et les sources d’énergies renouvelables qui ont contribué pour 10,3 TWh depuis le début de l’année. Cette situation a directement conduit à la diminution de la prime de risque sur les marchés à terme, tels que les contrats à terme pour les années calendaires 2024 et 2025.
En effet, non seulement on observe une baisse des prix, mais également une réduction de l’écart entre les prix futurs français et ceux des pays voisins européens. Toutefois, malgré les baisses de prix récentes, la demande demeure inférieure à ce que l’on a pu constater lors des années précédentes, et ces réductions de prix ne semblent pas stimuler la consommation. En outre, la production électrique en France a connu une augmentation de 18 % en l’espace d’un an, alors que la demande a baissé de 6 % selon les données fournies par RTE.
La production solaire a battu des records
Malgré des températures exceptionnellement élevées dans le sud de l’Europe, entraînant des pointes de consommation, l’énergie solaire a fonctionné à des niveaux remarquables, parvenant à répondre seule aux surplus de consommation ponctuelle. La production solaire en Sicile le mois dernier a dépassé plus du double de celle enregistrée en juillet 2022. En Espagne, près de 25 % de la production totale d’énergie en juillet a été attribuée à cette source solaire. Même dans des pays occidentaux plus frais et moins ensoleillés comme la Belgique, l’énergie solaire a été en mesure de couvrir plus de 100 % de la demande d’énergie supplémentaire requise pendant les pics de demande en milieu de journée.
Les prix négatifs subsistent sur le marché spot
Dans l’ensemble, l’Europe continue de générer de l’électricité avec des prix négatifs de manière régulière (sur le marché spot), principalement en raison de la forte production d’énergie renouvelable. Le manque de solutions face à ces prix négatifs diminue l’attrait pour de nouveaux investisseurs dans le domaine des énergies solaires renouvelables, comme l’indiquent 19 associations de ce secteur. Ces organisations soulignent la nécessité pour les décideurs publics de mettre en place un mécanisme de partage des coûts pour les systèmes renouvelables non subventionnés, afin de prévenir la fermeture de centrales solaires.
Finalement, les signaux suggèrent une orientation à la baisse pour les prix de l’électricité. La volatilité étant moins importante sur ce marché, à moins d’un changement géopolitique majeur, la probabilité pour que les prix connaissent une variation significative à la hausse paraisse faible.
Clément TUFFERY, Analyste Pricing
Marché du pétrole
Les cours mondiaux du brut s’orientent à la hausse pour une troisième semaine consécutive. Si les prix de l’or noir continuent de fluctuer à la hausse comme à la baisse d’une session à l’autre, la tendance majeure reste haussière. Ainsi, le vendredi 4 août, le BRENT (pétrole de la mer du Nord) clôture la semaine à 86,24 $/baril, soit en hausse de +1,25 $/baril sur le vendredi précédent (+ 1,47%).
De nouvelles annoncent viennent tendre le marché
Cette semaine, plusieurs annonces sont venues perturber le marché. En effet, le début de semaine clôturait très légèrement à la baisse, jusqu’au jeudi 3 août. Les indicateurs économiques, notamment américains et asiatiques, ont largement contribué à ce repli. L’activité industrielle chinoise s’est contractée sur le mois de juillet, alors que les économistes tablaient sur une légère expansion. Dans le même temps, le dollar, qui reste une valeur refuge pour les acteurs financiers, est repassé sous le seuil de 1,10 dollar pour un euro. La publication hebdomadaire de l’état des stocks américain par l’Agence américaine d’information sur l’énergie (EIA) n’a en revanche pas eu l’effet escompté.
Ces réserves commerciales ont chuté d’un montant inédit de 17 millions de barils. L’information n’a pourtant semblé pas avoir été prise en compte outre mesure. L’incertitude ambiante rend tout de même les investisseurs frileux et averses au risque. L’abaissement de la note de la dette américaine par l’agence de notation Fitch (de AAA, la note maximale, à AA+) a engendré un manque clair d’appétit pour le risque. Cette notation, scrutée par de nombreux acteurs financiers, met en lumière les préoccupations macroéconomiques en termes de croissance, tout comme l’effet des crises politiques à répétition sur le plafond de la dette américaine.
La pression sur l’offre se renforce
Ce constat étant fait, les fondamentaux du marché sont pourtant toujours là : une demande résiliente et un approvisionnement de plus en plus tendu. Pour certains analystes, les stocks mondiaux et régionaux ont une claire tendance à la diminution pour les mois, voire années à venir. Ce constat, prédominant dans l’esprit des investisseurs, est justifié par le maintien de la politique de réduction des objectifs de production de l’Arabie saoudite, et de la Russie.
L’Arabie saoudite va ainsi prolonger d’un mois supplémentaire sa réduction de production d’un million de barils/jour. L’annonce sortie jeudi dernier, a automatiquement eu un effet haussier sur les cours du brut. Même si cette annonce était largement attendue par de nombreux analystes, elle apporte une pression supplémentaire sur l’offre. Par ailleurs, cette décision pourrait même être prolongée, voire renforcée, d’ici la fin de l’année. Les membres de l’Opep+ espèrent ainsi maintenir les prix à un niveau élevé, et a minima stabiliser les cours à un niveau économiquement intéressant pour les principaux pays producteurs. En septembre, la production de l’Arabie saoudite devrait donc atteindre 9 millions de barils/jour. La Russie, quant à elle, a annoncé vouloir réduire sa production de brut de 500 000 barils/jour, et ce jusqu’à la fin de l’année.
Globalement, les cours restent volatils et sensibles à chaque nouvelle annonce mais la tendance reste haussière, tirée par l’affaiblissement continue de l’offre. Les prises de profits vont vraisemblablement engendrer de légères baisses ici et là, mais toujours dans l’espoir d’une plus-value à court/moyen terme.
Loïc ARILAZA, analyste pricing team leader
Marché du charbon
Cette semaine, le prix à terme du charbon européen (Rotterdam API2, Cal 2024) reste relativement stable pour atteindre 120,25 $/t le vendredi 4 août, soit une variation de +0,89 $/t sur le vendredi précédent (+0,75%). À court terme, la tendance est légèrement baissière, le contrat Rotterdam API2 Mois+1 clôturant vendredi à 109,50 $/t, soit 3 $/t de plus en une semaine.
Un prix du charbon qui reste très fluctuant
Sur le mois de juillet 2023, le prix à terme du charbon n’a cessé de fluctuer entre 100 et 135 $/t, tiraillé entre bonne production renouvelable pour la production d’électricité, des températures estivales plutôt clémentes, un prix de la tonne de CO2 émise relativement stable (81,83 €/t le 31 juillet, pour le contrat Dec.23), un prix du gaz naturel en baisse (poussé par l’afflux de GNL) et une offre mondiale suffisante.
Pour la question du gaz, les prix parviennent à se stabiliser à un niveau acceptable depuis maintenant plusieurs semaines, ce qui n’implique que peu d’intérêt pour le charbon thermique. Dans le même temps, la bonne production nucléaire, dans le cas de la France notamment, accompagnée d’un niveau de demande relativement faible pour le début de l’été, permet de moins faire appel au charbon dans le mix électrique. La production d’électricité à partir de charbon n’a d’ailleurs représenté « que » 20 TWh en Europe, en baisse si l’on compare au mois précédent.
Une tendance à la baisse est à prévoir à court terme
Les stocks européens suffisent, quant à eux, à faire face aux pics de demande, et à préparer l’hiver à venir. Il ne semblerait pas y avoir de réels signaux de pression du côté de l’offre. La demande reste donc globalement « faible » comparée à la même période de l’année en 2022. Les analystes estiment que les importations devraient atteindre 2,4 millions de tonnes en août 2023 (contre 2,3 millions de tonnes en juillet), ce qui reste bien en dessous du niveau de l’année passée (autour de 5,7 millions de tonnes pour le mois d’août 2022). À court terme, la tendance devrait donc être à la baisse, ou dans les scénarios les plus pessimiste vers une stabilisation des prix. À long terme, la tendance est moins claire. La rudesse de l’hiver à venir n’est pas connue, et la reprise asiatique, notamment chinoise, reste en dessous des prévisions du début d’année.
Quoi qu’il en soit, tant que le gaz reste attractif, il sera préféré au charbon, bien plus émetteur de gaz à effet de serre, et donc en contradiction avec les objectifs climatiques affichés par l’Union européenne.
Loïc ARILAZA, analyste pricing team leader
Vous voulez en savoir plus ? Notre magazine les Tendances de l’Energie vous détaille chaque mois les dernières nouvelles du marché de l’énergie.