Nos experts vous présentent leur analyse complète de toute l’actualité sur les marchés de l’énergie à la date de clôture du 26 juillet 2024.
Marché de l’électricité
Canicule et vents calmes : l’Europe en quête de gaz
Cette semaine, l’Europe se prépare à une hausse significative de la demande de gaz en raison de perspectives météorologiques caniculaires et d’une production éolienne insuffisante. Avec des températures élevées et peu de vent à l’horizon, le secteur de l’électricité devra probablement se tourner davantage vers le gaz pour répondre à la demande énergétique.
En France, la situation est particulièrement préoccupante : les risques de réductions de la production nucléaire en août, causées par le réchauffement des rivières, ajoutent une pression supplémentaire sur le marché de l’énergie. Le marché, nerveux, voit ainsi une augmentation des prix sur tous les CAL en une semaine entre 1,6% et 5%.
Le CAL25 grimpe de 17% en un mois, soit plus 11,4 €/MWh. Un été sous haute tension énergétique s’annonce.
Les algorithmes : les nouveaux joueurs du marché
La récente étude de l’Autorité néerlandaise des consommateurs et des marchés (ACM) et de l’Autorité néerlandaise des marchés financiers (AFM) met en lumière l’ascension du trading algorithmique dans l’électricité et le gaz.
Le rapport souligne les avantages du trading algorithmique. La transition énergétique, avec ses défis de prévision de la production renouvelable, pousse les acteurs à adopter des outils sophistiqués pour équilibrer leurs positions à court terme. Les algorithmes, encore souvent basés sur des règles définies par les traders, deviennent plus complexes avec l’introduction de systèmes d’auto-apprentissage, améliorant l’efficacité des transactions et la réactivité aux fluctuations du marché.
Cependant, cette montée en puissance n’est pas sans risques. Christian Bergqvist, professeur à l’Université de Copenhague, met en garde contre la manipulation du marché. Les « batailles de robots » et autres comportements manipulateurs perturbent la transparence et l’équité du marché, soulevant des inquiétudes parmi les régulateurs et les participants.
La révision du règlement sur l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie (Remit) impose de nouvelles obligations et renforce les compétences des autorités de régulation. Si les mesures de conformité et de risque sont désormais en place, leur mise en pratique reste à vérifier et la surveillance continue des activités algorithmiques demeure cruciale.
L’analyse électricité de notre expert
Entre accords nucléaires et limites énergétiques
Cette semaine a été dynamique sur le front énergétique européen, avec des développements significatifs en France et en Italie. Les aciéristes italiens ont conclu un accord avec EDF et d’autres entités pour l’approvisionnement en énergie nucléaire, visant à sécuriser une source stable et décarbonée essentielle pour leur secteur.
En France, l’État a annoncé une augmentation de 17% du soutien aux énergies renouvelables pour cette année et l’année prochaine, montrant sa volonté de consolider sa transition énergétique. Cependant, RTE, le gestionnaire du réseau électrique, va limiter les flux transfrontaliers à 8 GW à partir de lundi, ce qui pourrait compliquer les échanges énergétiques en Europe.
Les experts du secteur énergétique appellent à une clarification de la politique énergétique nationale avant la fin de l’année pour sortir de l’impasse actuelle, soulignant la nécessité de stabilité et de prévisibilité dans un contexte de volatilité accrue.
EDF, quant à elle, a vu les bénéfices de sa branche de trading chuter de 53% au premier semestre. Toutefois, une note positive émerge avec une production nucléaire annuelle atteignant le haut de la fourchette prévue, entre 315 et 345 TWh, démontrant la résilience de son parc nucléaire malgré les défis rencontrés.
– Helder FARIA RUBIO,
Responsable Pricing et Vente Indirecte chez Capitole Energie
Marché du gaz
Chaleur, pannes et incertitudes : le marché du gaz en ébullition
Semaine dernière, la scène énergétique européenne a été marquée par une série de développements inattendus.
Une panne imprévue à la centrale à gaz de Visund en Norvège a réduit les débits de 7 millions de mètres cubes par jour, provoquant une légère hausse des prix. Parallèlement, une vague de chaleur prévue en Europe centrale et une faible production éolienne ont accentué la nervosité du marché, déjà ébranlé par la menace de réductions de la production nucléaire française en raison des températures élevées des rivières.
Le CAL25 se maintient entre 34€/MWh et 39€/MWh depuis 62 jours, avec des variations faibles cette semaine, comprises entre 0% et 1,6% sur les différents calendriers.
Flotte sombre : La Russie à l’ombre des sanctions
La semaine dernière, le monde énergétique a été secoué par un développement discret mais perturbant : l’émergence d’une flotte « sombre » de méthaniers liés à la Russie, manœuvrant dans l’ombre des sanctions internationales.
Ces navires, dont les activités sont opaques, ont été utilisés pour contourner les restrictions sur l’exportation de gaz naturel liquéfié (GNL) russe, accumulant discrètement des cargaisons. Cette tactique représente un défi majeur pour les efforts occidentaux visant à réduire la dépendance au gaz russe.
Cette situation complique les calculs géopolitiques des grandes puissances et menace de déstabiliser les marchés de l’énergie déjà troublés. Les retombées sont particulièrement importantes pour l’Europe, en quête d’alternatives viables au GNL russe. Les ramifications économiques et politiques de cette crise énergétique en gestation pourraient avoir un impact durable.
Il est également crucial de noter que cette stratégie pourrait exacerber les tensions au sein de l’OTAN, alors que les pays membres doivent naviguer dans un paysage énergétique de plus en plus fragmenté. En somme, l’accumulation discrète de GNL par cette flotte obscure est plus qu’une manœuvre commerciale : c’est un élément perturbateur potentiel sur le grand échiquier géopolitique mondial.
L’analyse gaz de notre expert
L’Europe ajuste ses flux de GNL pour l’hiver
Cette semaine, les marchés énergétiques européens sont marqués par des évolutions significatives. Les importations de gaz naturel liquéfié (GNL) en Europe devraient rester modérées jusqu’à l’automne, en raison d’une demande estivale faible et de stocks accumulés, ce qui pourrait freiner les volumes d’importation avant la hausse prévue de la demande hivernale.
Parallèlement, la Finlande a cessé d’importer du GNL russe, une décision prise en réponse aux tensions géopolitiques et aux efforts de diversification des sources d’approvisionnement. Ce changement illustre la volonté des pays européens de réduire leur dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie.
Freeport, l’un des plus grands exportateurs de GNL des États-Unis, rencontre des défis techniques, mais les experts estiment que ces problèmes ne devraient pas compromettre son redémarrage complet. La reprise de Freeport est cruciale pour stabiliser les marchés internationaux du GNL.
En Italie, un lobby réclame une augmentation de la capacité de gaz interruptible pour l’hiver. Cette mesure vise à garantir une réserve suffisante pour faire face aux pics de consommation pendant les mois les plus froids, assurant ainsi la sécurité énergétique du pays.
– Helder FARIA RUBIO
Responsable Pricing et Vente Indirecte chez Capitole Energie
Tendances énergétiques : Entre scepticisme sur le carbone et réalités du charbon
Semaine dernière, les marchés ont vu se dessiner un tableau économique aussi complexe qu’intriguant, oscillant entre tension environnementale et réalités énergétiques.
D’un côté, les investisseurs ont visiblement pris position contre le marché du carbone, avec une augmentation notable de 29 % des positions nettes courtes sur les contrats de CO2. Cette tendance, qui porte le volume des positions courtes à son niveau le plus élevé en trois mois, reflète un scepticisme croissant face à la solidité des mécanismes de régulation des émissions. Ce retournement pourrait bien signaler une prise de profit ou une anticipation de nouvelles turbulences dans le domaine de la transition énergétique.
De l’autre côté du spectre énergétique, la situation du charbon en Europe est loin d’être sereine. Les stocks de charbon dans les terminaux européens ont chuté à leur niveau le plus bas depuis deux ans, un signe que les approvisionnements se resserrent alors même que la demande de charbon est prévue pour plonger de 19 % cette année, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Ce déclin de la demande, qui frôle des niveaux records, illustre une transition énergétique en marche, mais pose également la question de l’équilibre entre approvisionnement et demande.
En parallèle, la question ukrainienne ne semble pas bouleverser les marchés pétroliers de manière significative. La récente interdiction russe sur le transport de pétrole ukrainien ne suscite pas de panique excessive, suggérant que les répercussions pourraient rester contenues. À première vue, cette mesure n’entraîne pas de fluctuations majeures sur les marchés, laissant présager une résilience plus grande qu’attendue dans un contexte géopolitique tendu.
En somme, les marchés naviguent entre une volatilité accrue dans le secteur du carbone, des signaux contradictoires sur le charbon et une stabilité inattendue dans les échanges pétroliers. La semaine a montré que, bien que les turbulences économiques soient omniprésentes, les réponses des marchés sont souvent plus nuancées que prévues.
– Helder FARIA RUBIO
Responsable Pricing et Vente Indirecte chez Capitole Energie
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