Nos experts vous présentent leur analyse complète de toute l’actualité sur les marchés de l’énergie à la date de clôture du 28 mars 2025.
Marché de l'électricité
Un marché sous l’influence des renouvelables

Le marché de l’électricité en Allemagne illustre parfaitement l’impact croissant des énergies renouvelables sur les prix. L’augmentation de la production solaire et éolienne, combinée à une demande en baisse, entraîne une chute des prix, avec même des prix horaires négatifs attendus. Cette volatilité met en lumière la nécessité d’adapter le réseau et les mécanismes de stockage pour éviter des déséquilibres excessifs.
En France, la tendance est similaire, avec une consommation en retrait. Cependant, cette dépendance accrue aux énergies intermittentes soulève la question de la stabilité du réseau, d’autant plus que la disponibilité du lignite en Allemagne diminue. Une adaptation des politiques énergétiques est donc essentielle pour garantir une production stable et un prix de l’électricité qui reflète réellement les coûts de production.
À la une
L’éviction de Luc Rémont, une bataille d’influence ?
L’éviction de Luc Rémont de la tête d’EDF marque un tournant dans la politique énergétique française. En désaccord avec l’État sur la signature des contrats à long terme et le financement du programme nucléaire, Rémont a été poussé vers la sortie au profit de Bernard Fontana, actuel dirigeant de Framatome.
Un blocage sur les contrats énergétiques
L’une des causes principales du départ de Rémont réside dans la lenteur des négociations avec les industriels. L’objectif était de vendre l’électricité nucléaire à 70 euros/MWh sur la période 2026-2040. Or, seuls deux accords ont été signés en raison d’un prix jugé trop élevé par les entreprises concernées.
Un financement nucléaire contesté
Autre point de friction : le financement du programme EPR2. Alors que l’État a annoncé un prêt couvrant au moins la moitié des 67,4 milliards d’euros estimés pour la construction de six réacteurs, Rémont juge cette aide insuffisante par rapport aux subventions accordées aux énergies renouvelables.
Une vision opposée
Dans une interview au Figaro, Luc Rémont a exprimé sa frustration face à l’interventionnisme étatique, regrettant que l’État impose ses décisions plutôt que de privilégier la performance et la compétitivité d’EDF.Avec cette décision, le gouvernement espère accélérer la transformation du secteur énergétique. Reste à voir si Bernard Fontana saura répondre aux attentes du marché et de l’État.
Les tendances électricité de la semaine par notre expert
Réforme, nucléaire et interconnexions
Le projet de renforcement des interconnexions électriques entre la France, l’Irlande et l’Espagne rencontre des obstacles. La Commission de régulation de l’énergie (CRE) alerte sur un retard possible en raison de la complexité des travaux en mer et d’un risque de dépassement budgétaire. Le Celtic Interconnector (700 MW) avec l’Irlande, prévu pour 2027, coûterait 1,6 milliard d’euros, tandis que la liaison Golfe de Gascogne (2,2 GW) avec l’Espagne, attendue en 2028, s’élèverait à 2,9 milliards d’euros. La CRE exige de RTE une analyse approfondie des plannings et une marge de sécurité financière.
Pour garantir son indépendance énergétique, la France doit relancer la technologie des réacteurs à neutrons rapides (RNR), affirme Joël Barre, responsable du programme nucléaire d’EDF. Ces réacteurs exploitent l’uranium appauvri et le plutonium, réduisant ainsi la dépendance à l’uranium naturel. Toutefois, un premier RNR ne verrait le jour qu’après 2050. Le Conseil de politique nucléaire a demandé un plan d’action aux industriels d’ici fin 2025.
Seul le Danemark a transposé les nouvelles règles du marché de l’électricité de l’UE dans son droit national, exposant les 26 autres pays à des poursuites de la Commission européenne. Ces règles visent à stabiliser les prix et réduire la dépendance aux combustibles fossiles. Les États disposent de deux mois pour se conformer avant d’éventuelles sanctions.
– Helder FARIA RUBIO
Responsable Vente Indirecte et Partenariats chez Capitole Energie
Marché du gaz
Tensions sur l’approvisionnement et incertitudes géopolitiques

Le marché du gaz reste sous pression, entre faibles niveaux de stockage et augmentation des importations de GNL. L’Europe peine à reconstituer ses réserves, affichant des taux bien en deçà des niveaux de l’an dernier. Malgré une hausse des importations, notamment due à une demande asiatique en repli, les inquiétudes persistent quant à l’atteinte des objectifs de stockage hivernal. À cela s’ajoutent les incertitudes géopolitiques, avec la guerre en Ukraine et la dépendance croissante aux importations américaines.
La volatilité des prix reflète cette dualité : d’un côté, un soutien haussier par le déficit de stockage ; de l’autre, une pression baissière exercée par l’afflux de GNL. L’Europe se retrouve ainsi dans une situation délicate où chaque aléa, qu’il soit climatique, économique ou géopolitique, peut faire basculer le marché. Une stratégie d’approvisionnement plus diversifiée et une meilleure gestion des stocks s’imposent pour limiter les risques à venir.
À la une
L'Europe face au défi du stockage de gaz
Les prévisions de stockage de gaz pour l’hiver prochain sont préoccupantes. Selon les analystes de LSEG, les stocks combinés des Pays-Bas, de l’Allemagne, de la Belgique et de la France atteindraient seulement 77 % de leur capacité d’ici le 1er novembre, bien en deçà de l’objectif des 90 %. Dans un scénario plus pessimiste, marqué par un hiver rigoureux, les niveaux chuteraient à 66 %, laissant craindre un épuisement complet des stocks en fin de saison froide.
Une demande en hausse et des tensions sur l’offre
Cette situation s’explique par une demande de gaz plus forte que prévu, due à une production éolienne insuffisante et aux périodes de froid hivernal. Par ailleurs, l’arrêt des livraisons de gaz russe via l’Ukraine a réduit l’approvisionnement de 40 millions de mètres cubes par jour. Bien que l’Europe doive bénéficier d’une hausse de 7 % des importations de GNL cet été – principalement en provenance des États-Unis –, cela ne suffira pas à combler le déficit.
Des mesures européennes en discussion
Face à cette menace, l’UE envisage d’imposer des objectifs intermédiaires de stockage aux États membres. Un projet de réglementation en cours de négociation pourrait rendre ces seuils contraignants, notamment sous l’impulsion des Pays-Bas. Toutefois, certains pays dénoncent une mesure qui pourrait fausser le marché et faire grimper les prix du gaz. La présidence polonaise espère aboutir à un accord avec le Parlement européen d’ici fin juin.
Les tendances gaz de la semaine par notre expert
Suppression de la taxe Allemande sur le gaz
Le gouvernement allemand prévoit de supprimer la taxe sur le stockage du gaz pour alléger la pression sur les prix. Cette mesure, qui affecte les points de retrait, a été instaurée en 2022 pour pallier les effets de la crise énergétique provoquée par l’invasion de l’Ukraine. Bien que la taxe ait récemment augmenté, le pays prévoit désormais de la supprimer pour encourager un approvisionnement en gaz plus stable et plus abordable. Cependant des détails sur le remplissage des installations de stockage restent flous, notamment.
Malgré les efforts de réduction des consommations, l’Allemagne prévoit une augmentation de la demande de gaz de 10% d’ici 2030. Ce phénomène est dû à l’extension des centrales à gaz dans le cadre de ses projets d’infrastructure. Toutefois, des changements dans la mixité énergétique, notamment l’essor des énergies renouvelables, devraient limiter l’impact de cette hausse.
L’Ukraine recevra un soutien financier pour reconstituer ses réserves de gaz, avec un prêt de 270 millions d’euros de la BERD et une subvention de 140 millions d’euros de la Norvège. Ces fonds sont cruciaux pour traverser l’hiver, le pays ayant vu ses stocks chuter à un niveau historiquement bas à cause des attaques russes et des difficultés financières liées à la guerre.
– Helder FARIA RUBIO
Responsable Vente Indirecte et Partenariats chez Capitole Energie
Zoom sur l'énergie verte
Baisse des prix des Garanties d’Origine et mesures solaires en France
Un excédent d’offre pèse sur les prix des GO
Les prix des garanties d’origine (GO) en Europe continuent de chuter, impactés par une offre excédentaire. En dépit de la demande stimulée par les prix bas, les contrats Cal 24 et Cal 25 restent faibles, autour de 0,25 EUR/MWh et 0,65 EUR/MWh respectivement. Le marché peine à absorber un surplus d’offre depuis 2023, estimé à 120 TWh. Toutefois, la demande pourrait se redresser lentement en 2025, avec une attention particulière portée sur les évolutions climatiques et la production d’hydroélectricité, qui pourrait stabiliser les prix à court terme.
Réduction des tarifs solaires : un ajustement nécessaire
En France, le gouvernement a modifié le décret d’aide pour les petites installations solaires, réduisant le tarif d’achat des installations de 100 à 500 kW de 105 à 95 EUR/MWh. Cette réduction vise à mieux gérer l’impact sur les finances publiques. À partir de juillet 2025, le système de tarif d’achat sera remplacé par un appel d’offres simplifié. Cette décision, bien que controversée, répond à la nécessité de maintenir l’équilibre financier tout en soutenant l’industrie solaire.
Hydrogène vert : un pari sur l’avenir
Le gouvernement allemand a lancé la construction d’un réseau national d’hydrogène vert pour 19 milliards d’euros, visant à soutenir les industries allemandes dans leur transition énergétique d’ici 2032. Cette initiative s’inscrit dans une stratégie ambitieuse pour stimuler le marché de l’hydrogène, malgré les obstacles rencontrés par certains projets.
Royaume-Uni : une baisse significative des émissions de GES
Les émissions de gaz à effet de serre du Royaume-Uni ont diminué de 4 % en 2024, grâce à la réduction de l’utilisation du charbon et du gaz dans l’industrie et la production d’électricité. Malgré une hausse dans le secteur des transports et de l’aviation, le pays continue sa course vers une réduction de 81 % des émissions d’ici 2035.
– Helder FARIA RUBIO
Responsable Vente Indirecte et Partenariats chez Capitole Energie
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