Cette semaine encore, nos experts vous présentent leur analyse complète de toute l’actualité sur les marchés de l’énergie à la date du 8 septembre 2023.
Marché de l’électricité
La semaine dernière, les prix de l’électricité ont poursuivi leur baisse pour les contrats futurs à échéance 2024, 2023 et 2025. Le vendredi 8 septembre, le contrat EEX FRENCH POWER FUTURES Cal-25 se négociait à 133,47 €/MWh, soit 12,01 €/MWh de moins en une semaine (- 8,26%). Après un début d’année 2023 encore très troublé par la crise énergétique initiée par le conflit russo-ukrainien, le marché a trouvé une certaine stabilité ces derniers mois. Plus particulièrement, la situation française s’est considérablement améliorée, ce qui a permis une chute continue et régulière des prix à terme.
Une production record, des prix bas
La production nucléaire a enregistré une augmentation de 32 % sur le mois d’août, atteignant 24 TWh, ce qui équivaut à près de 66 % de la production nationale totale, couvrant ainsi les trois quarts de la demande électrique. De plus, sur une période d’un an, la production éolienne et hydroélectrique a augmenté de près de 30 %, tandis que la production solaire a enregistré une croissance de 12 %. Ces bons indicateurs du côté de l’offre contribuent largement à un sentiment d’optimisme croissant sur le marché. Par ailleurs, les prix du contrat à terme pour une livraison sur l’année 2024 (EEX FRENCH POWER FUTURES Cal 2024) sont également actuellement à leur plus bas de l’année, se négociant en dessous de 135 €/MWh.
De bonnes prévisions pour l’hiver à venir
La France devrait maintenir son statut d’exportateur net d’électricité tout au long de la saison hivernale. La combinaison d’une diminution de la demande et d’une augmentation de la production d’énergie d’origine nucléaire et hydroélectrique permet à la France de générer un excédent par rapport à sa consommation quotidienne. Plus précisément, la demande électrique en France est actuellement inférieure de 8,7 % à la moyenne enregistrée entre 2018 et 2022. Actuellement, une exportation moyenne de 1,8 TWh est prévue entre janvier et mars, à condition qu’aucun événement majeur, et imprévisible, ne survienne.
Proposition d’un nouveau cadre réglementaire d’ici la fin de l’année
Le gouvernement envisage de mettre en place un nouveau cadre réglementaire visant à anticiper la fin du dispositif ARENH en 2025 et à fournir aux fournisseurs et aux entreprises une orientation claire d’ici 2024. Bien que rien ne soit encore définitivement arrêté, l’objectif est de réduire la volatilité des prix en offrant des signaux à long terme. Actuellement, il est question de l’introduction de contrats pour différence (CFD) et de PPA (Power Purchase Agreement), contrats à long terme déjà utilisés pour le développement des énergies renouvelables pour lesquels le prix de vente de l’électron produit revêt un caractère déterminant pour la mise en place des projets de construction.
EDF également se penche sur la fin prévue du mécanisme ARENH (Accès Régulé à l’énergie Nucléaire Historique) et le devenir de ses relations, pas toujours très chaleureuses, avec les fournisseurs alternatifs. Il serait question de créer un système d’enchères inédit pour fixer un prix d’achat (à moyen terme) à destination des fournisseurs alternatifs qui ne disposent que de peu de moyens de production. Ainsi, les fournisseurs alternatifs pourraient s’approvisionner sur 5 ans, à un prix connu d’avance et résultant d’enchères. L’objectif est de pouvoir proposer aux clients professionnels et résidentiels les prix de marché les plus attractifs. Si ce nouveau dispositif innovant voit effectivement le jour, les dynamiques de marché pourraient être modifiées.
Globalement, le marché se porte mieux, bien mieux, et la tendance baissière pourrait se poursuivre, même si vraisemblablement dans une moindre mesure. L’atteinte d’un prix plancher n’est pas encore visible, notamment du fait de l’incertitude concernant l’hiver à venir, mais la courbe s’oriente dans la bonne direction.
Loïc Arilaza, Analyste Pricing chez Capitole Energie
Marché du gaz
Les prix du gaz restent relativement stables une semaine supplémentaire. Le vendredi 8 septembre, le contrat pour une livraison en 2024 (EEX PEG NATURAL GAS FUTURES CAL-24) se négociait à 49,938 €/MWh, soit 1,63 €/MWh de moins sur le vendredi précédent (- 3,16 %).
Les tensions persistent sur les plateformes australiennes dans le secteur du GNL
Les investisseurs attendent avec impatience les résultats des négociations à venir concernant le risque de grève en Australie. D’ailleurs, le préavis de grève a été repoussé d’une journée, laissant penser que les discussions entre les deux parties sont plutôt constructives, et qu’un accord demeure possible malgré l’escalade des tensions de ces derniers jours. Un porte-parole de Chevron a déclaré qu’ils prenaient des mesures pour garantir le maintien d’opérations sûres et fiables en cas de perturbations dans les installations. Bien que l’Europe ne reçoive pas directement de GNL en provenance d’Australie, l’effet domino engendré par le manque à fournir en Asie pourrait ainsi impacter la destination des méthaniers. L’Australie, plus gros exportateur de GNL au monde, joue un rôle majeur dans la régulation des flux mondiaux. La résolution rapide et positive des tensions est donc scrutée par les acteurs du marché.
Un marché plutôt solide
Sur le hub hollandais (TTF) plus liquide, le contrat à terme pour l’année calendaire 2024 (EEX TTF Natural Gas Futures CAL-24) maintient sa proximité pour se négocier à 50,96 €/MWh le vendredi 8 septembre. Les fondamentaux du marché demeurent relativement solides, et ce depuis plusieurs semaines.
En Europe, le niveau de stockage dépasse actuellement les 93 % (90 % pour la France), dépassant ainsi l’objectif fixé pour le mois de novembre. Il est également prévu une augmentation des approvisionnements gaziers en provenance de Norvège à mesure que les travaux de maintenance touchent à leur fin.
Le nouveau port méthanier au Havre bientôt en service
Le tribunal de Rouen a rejeté le troisième recours contre le futur terminal méthanier du port du Havre. Il est prévu qu’il soit opérationnel à partir du 15 septembre, avec une capacité d’accueil de 5 Gm3/an. La construction entamée l’an dernier vise précisément à apporter une réponse en matière de lutte contre les crises énergétiques, et la dépendance vis-à-vis de certains fournisseurs stratégiques. Actuellement, la France dispose de 4 terminaux méthaniers, qui ont contribué en grande partie à la chute puis à la stabilisation constatée des prix de marché.
Ainsi, le marché européen du gaz se porte également mieux, loin des tumultes observés en 2022 et début 2023. L’afflux important de GNL vers l’Europe continue de permettre la baisse des prix de marché, tout comme la réduction significative de la demande. L’hiver sera, comme habituellement, un moment de tension, mais le niveau de remplissage des stocks permet d’avoir de bonnes perspectives et d’éviter vraisemblablement les pénuries. Il faut néanmoins surveiller le réveil (donc la croissance) des pays asiatiques, qui peut à tout moment apporter de nouvelles tensions.
Marché du pétrole
Nouvelle semaine de hausse pour les prix du BRENT (brut de la mer du Nord). Le vendredi 8 septembre, le contrat pour une livraison en novembre 2023 clôturait à 90,65 $/baril, soit 2,10 $/baril de plus sur le vendredi précédent (+ 2,37%).
Réduction de la production des principaux pays exportateurs
Malgré les défis posés par le contexte macro-économique tendu aux États-Unis, et plus encore en Chine, les prix du mondiaux des deux références mondiales du brut (WTI & BRENT) continuent de grimper. Les cours ont atteint leur plus haut niveau depuis près d’un an, dépassant les 90 $/baril.
Des annonces drastiques de la part des Saoudiens et des Russes
L’OPEP+ maintient son intention de prolonger et de potentiellement renforcer sa réduction d’objectif de production d’au moins un mois supplémentaire. En effet, la stratégie observée par l’Arabie saoudite est de réexaminer mensuellement ses quotas de production pour se laisser toute latitude d’augmenter ou réduire davantage l’objectif d’environ 9 millions de barils par jour. Parallèlement, la Russie a quant à elle promis de priver le marché de 300 000 barils/jour à l’exportation durant les trois derniers mois de l’année. La nouvelle annonce russe survient après que le pays ait déjà réduit ses volumes de 500 000 barils/jour en août, puis de 300 000 barils/jour en septembre. Certains analystes tablent désormais sur un déficit de 2,7 millions de barils/jour de l’offre par rapport à la demande au dernier trimestre de l’année. Ces mesures drastiques ont d’autant plus d’impact qu’aucune alternative sérieuse n’apparaît en position de combler tout ou partie du déficit engendré. Une certaine nervosité persiste donc dans l’esprit des investisseurs.
Une demande asiatique toujours en berne
Les prix du pétrole baissaient légèrement jeudi, lestés par un nouvel indicateur économique décevant venant de Chine qui ravive les inquiétudes quant à la demande du pays. Pour le quatrième mois consécutif, les exportations chinoises se sont contractées en août, pénalisées par une faible demande étrangère et un réel ralentissement économique dans le pays. Premier importateur de brut au monde, la croissance chinoise est scrutée par les acteurs du marché. Cette morosité de l’activité économique chinoise permet de limiter les hausses trop importantes, bien que les pressions exercées sur l’offre prennent clairement le dessus.
L’état des stocks américains bien plus faible que prévu
Publié le jeudi 7 septembre, le rapport de l’Agence américaine d’information sur l’énergie (EIA) a entraîné une nouvelle hausse des cours de l’or noir en fin de semaine. En effet, les stocks commerciaux américains de brut ont diminué davantage que prévu, de 6,3 millions de barils contre 2 millions de barils anticipés. Le niveau des stocks est à son plus bas depuis le début du mois de décembre 2022. Concernant les stocks d’essence, ils sont également à un niveau plus faible que prévu. Cette tendance perdure depuis près de 5 semaines, et les stocks ont reculé de près de 29 millions de barils sur cette période. Ce constat interroge d’autant plus sur la suffisance (ou non) de l’offre mondiale d’ici la fin de l’année 2023.
Ainsi, la tendance reste à la hausse en ce début de mois de septembre. Les effets conjugués de la réduction de l’offre des pays de l’OPEP+ et de faiblesse des réserves américaines contribuent au sentiment d’incertitude. Même si les cours résistent face à la faible demande chinoise, il n’est pas impossible que les cours du BRENT tutoient à nouveau 100 $/barils d’ici la fin de l’année.
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