Cette semaine encore, nos experts vous présentent leur analyse complète de toute l’actualité sur les marchés de l’énergie à la date de clôture du 22 septembre 2023.
Marché de l’électricité
Après une légère correction haussière la semaine dernière, le marché est reparti à la baisse cette semaine. Le marché retrouve alors le sentier baissier engagé maintenant depuis mi-juin soutenu par une diminution des craintes portées sur l’offre d’électricité. La demande d’électricité s’inscrit dans l’ombre de celle de la semaine précédente avec des niveaux de consommation compris entre 35 GW et 50 GW.
Le contexte énergétique semble être en bonne posture en France et en Europe à la veille de la période hivernale : le contrat CAL 24 Baseload se maintient dans un corridor de prix entre 130 €/MWh et 140 €/MWh. Les prix du contrat CAL 24 Baseload ont diminué de -2,19 €/MWh cette semaine en clôturant ce vendredi 22 septembre à 133,43 €/MWh (soit une baisse de -1,61 % par rapport au vendredi 15 septembre). Les prix des contrats CAL 25 et CAL 26 Baseload ont quant à eux suivi une évolution inverse en accusant d’une augmentation respective de +1,58 % et de +1,20 %.
Une production nucléaire en meilleure forme en 2023
Les capacités de production d’EDF ont été moins impactées par les évènements climatiques en 2023 par rapport à 2022. Grâce à une météo moins chaude et plus humide, combiné à un programme de redémarrage et de maintenance du nucléaire plus adapté, EDF a perdu moitié moins de production nucléaire depuis le début de l’année. En somme, malgré des pics caniculaires menant à des baisses de production, le parc nucléaire français est mieux armé pour affronter l’hiver 2023-2024 que l’année dernière.
Une révision du coût du nucléaire
La CRE a révisé son évaluation du coût de l’électricité nucléaire à 60,70 €/MWh. L’estimation du coût complet de la CRE est basée sur une production annuelle moyenne cohérente avec les hypothèses de RTE. Cette révision est établie dans un contexte d’une réforme du mécanisme de l’ARENH, permettant aujourd’hui aux fournisseurs alternatifs d’accéder à de l’électricité nucléaire à 42 €/MWh. Cette réévaluation pourrait alors aller dans le sens d’une augmentation du prix de l’ARENH.
Une stabilisation du coût de la garantie de capacité
La 4ème enchère de capacité (21 septembre) a atteint 32 799 €/MW pour une livraison en 2024, soit -6,71% par rapport à la précédente enchère du 22 juin. Les fournisseurs d’électricité en France sont tenus de détenir de garanties de capacité pour l’électricité sourcée sur le marché afin de garantir la sécurité de l’approvisionnement lors de de pics de consommation. Le mécanisme finance la disponibilité de la capacité de production. Si la disponibilité nucléaire continue de s’améliorer, la prochaine enchère de capacité pourrait suivre cette tendance baissière. En décembre 2022, le prix des garanties de capacité pour 2023 avait atteint un record à 60 000 €/MW, traduisant des fortes tensions sur le réseau.
Marché du gaz
Cette semaine, la phase de stabilisation du marché gazier se poursuit depuis près de 8 mois désormais. Durant cette période, le contrat PEG CAL 24, par exemple, oscille entre 45 et 55€/MWh, ce qui témoigne d’une volatilité moins importante. Plus en détails, les produits gaziers ont connu des variations assez différentes selon leur temporalité. Les prix de court terme ont augmenté, contrairement aux prix de plus long-terme comme le contrat PEG CAL 24 qui a clôturé en légère baisse à 49,51 €/MWh pour une livraison en 2024 (EEX PEG NATURAL GAS FUTURES Cal-24) le vendredi 22 septembre, soit 1,69 €/MWh de moins en une semaine (-3,42 %).
Le gaz australien reprend du poil de la bête
Les salariés du géant américain de l’énergie CHEVRON sont prêts à mettre un terme à la grève en cours, sur les sites de production de gaz du groupe en Australie occidentale. A cela s’ajoute le fait que la production de l’usine de GNL de Wheaststone en Australie ait repris à pleine capacité après une baisse de 20% durant trois jours. Le problème venait en effet de l’arrêt d’une turbine dans l’une des deux usines.
Parallèlement à cette bonne nouvelle, s’ajoute le retour progressif des flux gaziers en provenance de Norvège. Les stocks de gaz sont également toujours confortables, alors même que la demande de gaz reste modérée en Europe. Tous ces éléments favorisent donc l’atténuation et la stabilisation des prix du gaz.
« Il faut mettre de l’eau dans son vin, pour qu’il n’y ait pas d’eau dans le gaz »
Malgré la stabilisation des prix, l’Europe ne peut toujours pas se permettre de rompre totalement ses liens avec la Russie. Actuellement, la Russie exporte entre 15 et 20 millions de tonnes de GNL, ce qui n’est pas négligeable. Cette interdépendance peut être expliquée par plusieurs facteurs. Dans un premier temps, la majorité des différents projets gaziers sont susceptibles d’aboutir courant 2025/2026. En attendant cette nouvelle ère, l’UE est donc contrainte de consolider son approvisionnement. Dans un second temps, l’UE dépend actuellement du marché spot pour environ 70% de ses importations de GNL. Cela peut être expliqué par le fait que de nombreux acheteurs sont réticents à l’idée de conclure des contrats de long terme, au regard des efforts régionaux réalisés dans le but de réduire considérablement la part des combustibles fossiles au cours des prochaines des années. Le fait ne pas se positionner sur le long terme engendre donc une volatilité plus élevée.
Marché du pétrole
Cette semaine, les cours mondiaux du brut ont affiché une relative stabilité, notamment sur les deux références mondiales (WTI aux Etats-Unis, et BRENT pour l’Europe). Le vendredi 22 septembre, le contrat BRENT pour une livraison mois+2 clôturait ainsi à 93,27 $/baril, soit 0,66 $/baril de moins sur le vendredi précédent (-0,70 %).
Un léger recul après des prises de bénéfice et une demande plus faible
Le début de semaine voit les cours clôturer légèrement en hausse sur la dernière session du vendredi 22 septembre, dans un contexte toujours tendu concernant l’offre mondiale. Ces dernières semaines, les craintes de pénurie avaient clairement orienté les cours vers le haut, en tout cas jusqu’au milieu de semaine dernière.
Dès le mercredi 20 septembre, les cours du brut (BRENT & WTI) reculaient, notamment du fait de prises de bénéfices au regard des hausses successives constatées ces dernières semaines. De plus, la posture très offensive de la banque centrale américaine (Fed) a contribué au léger repli. En effet, la Fed prévoit, majoritairement, une nouvelle hausse de ses taux d’intérêts directeurs pour la fin d’année 2023. Le marché anticipe d’ailleurs que les taux directeurs devraient se maintenir à un niveau plus élevé encore en 2024, alors que les projections du mois de juin dernier étaient plus optimistes.
La publication hebdomadaire des stocks américains a également appuyé ce repli. Le rapport a montré cette semaine un ralentissement du taux d’activité des raffineries aux Etats-Unis, à 91,70 % contre 93,10 % précédemment, soit le niveau le plus bas depuis presque trois mois. La demande d’essence a été aussi relativement plus faible, soulignée par le faible niveau des importations, à leur plus bas depuis six mois. Globalement, les regards se sont davantage portés sur la demande, alors que jusqu’ici l’offre occupaient plutôt les esprits. Bien que ce constat soit vrai, il ne semblerait pas pour autant que l’on assiste à un réel retournement du marché, du moins à court terme.
Une aversion pour le risque plus accentuée
Les cours restent volatils d’une session à l’autre, rien d’exceptionnel pour autant sur les marchés des matières premières tels que le pétrole brut. Néanmoins, les récents événements poussent les investisseurs à la prudence, au profit de valeurs refuges comme le dollar, par exemple, un actif moins risqué que le pétrole ces derniers temps. Même si les taux d’intérêts de la Fed n’ont pas encore effectivement été revus à la hausse, cette perspective suffit à échauder les acteurs. Ces anticipations ont d’ailleurs donné de la vigueur au dollar, ce qui se répercute négativement sur l’attrait pour les matières premières. Les cours de l’or étant libellés en dollar, l’appréciation de la devise décourage les achats, diminuant le pouvoir d’achat des acheteurs utilisant d’autres devises.
Les cours cherchent une nouvelle direction claire
Nous l’avons vu, les acheteurs ne se bousculent pas sur le marché. La séquence de hausse semble bel et bien s’essouffler, selon l’analyse de nombreux analystes. Même l’annonce, jeudi dernier, de la suspension par la Russie des exportations de gazole et d’essence vers toutes les destinations exceptées quatre anciennes républiques soviétiques, n’a pas suffi à relancer les cours. Cela est d’autant plus vrai que cette décision russe devrait être temporaire, dans le but selon les autorités russes de stabiliser son marché intérieur. Les exportations russes de diesel représentent environ 1 millions de barils/jour, soit 16% de l’approvisionnement par voie maritime, alors que la part de l’essence est beaucoup plus faible, environ 3%.
La tendance baissière du côté de l’offre est d’ailleurs bien connue du marché à la suite des différentes annonces de réduction des objectifs de production de l’Arabie saoudite et de la Russie pour la fin 2023. La direction prise par le marché est donc aujourd’hui moins claire qu’hier, les investisseurs étant tiraillés entre aversion pour le risque accompagnée d’inquiétudes sur la demande et pressions exercées sur l’offre.
Globalement, la fuite en avant observée ces dernières semaines semble se calmer légèrement. Le marché cherche une nouvelle direction claire entre frilosité des acheteurs et inquiétudes sur l’offre. Les prochaines sessions donneront un meilleur visuel quant à l’avenir des cours du brut d’ici la fin de l’année.
Loïc Arilaza, Analyste Pricing chez Capitole Energie
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